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A dix-neuf printemps, squatter chez mes parents,
Faire le fils à ma maman me semblait indigne de mon talent
De moi , je voulais me sentir fier
mais ne savais ni quoi, ni comment faire.
j’avais bien sûr, bon pied , bon œil
et aussi surtout beaucoup trop d’orgueil
et j’en avais marre de cette peau,je voulais du neuf du nouveau,
Je voulais savoir ce je vaux, je voulais connaître mon niveau,.
Et à défaut de changer de peau, restait à changer de lieu,
Quitter mes vieux, quitter ma banlieue, mes amis d’enfance
Mes potes de l’adolescence, l’oisiveté, le vide
intérieur, le vice et l’absence
Pour les bruits, les rires, les lumières de la ville,
L’allure chic des filles, leur sex-appeal
qui me faisait les yeux comme des billes.
J’avais même concédé à changer mon style,
tellement j’étais à fond décidé à monter en ville.
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A dix-neuf printemps, squatter chez mes parents,
faire le fils à ma maman me semblait indigne de mon talent
De moi, je voulais me sentir fier
mais ne savais ni quoi, ni comment faire
j’avais bien sûr bon pied, bon œil
et aussi surtout beaucoup trop d’orgueil
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Sans filet, sans me défiler et sans un flèche
Sans savoir où je m’étais paumé, je partais à ma recherche.
Malin comme j’étais, je me débrouillerais comme un grand
Survivre autrement au lieu de se crever honnêtement
Comme le faisaient mes parents depuis si longtemps.
et vive les magouilles,la débrouille,les embrouilles,
et aussi la trouille et souvent le ventre qui gargouille.
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J’ai embrassé tout ça à tour de bras !
Mais je n’étais certainement pas doué pour ça:
Car il y a bien eu des hauts mais surtout des bas.
Débat: entre Moi et Moi ! ! ! ! ! !
Faire des trucs que tu n’aimes pas, des trucs que je n’aime pas
des trucs de caïras: Demandes-moi pourquoi ?
Tous les jours pour une misère je risquais la prison
Alors qu’autour de moi je n’avais que contre-exemples à foison
Nager à contre-courant t’amène rarement ou tu prétends
mais pour le comprendre,l’entendre, j’ai bien pris mon temps!
A 19 printemps squatter chez mes parents
faire le fils à ma maman, me semblait indigne de mon talent
De moi, je voulais me sentir fier,
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Dans notre univers quasi tribal de post-ados en rupture sociale
Il était de bon ton de dire: »J’SUIS UN MARGINAL! »:! »
Alors tout ce que punissait le code pénal devenait normal,
Banal, « Même pas mal ! »comme disait ce fier marginal
Qui avait reçu des coups de marteau en rafales
Là où d’autres auraient juste reçus des mandales
Dans une histoire à deux balles : Deux balles !
je me rappelle de lui me filant un « Pascal »
Un soir où il avait touché de l’argent je ne sais en quoi faisant
Et partant acheter de l’héro , de la coke et de l’afghan.
Je me souviens aussi l’avoir rencontré au petit matin
Malade comme un chien, sans plus le moindre fifrelin
Disant: »Ça ira mieux demain! »
Mais ses lendemains ont déchanté, son âme torturée
N’a pu supporter, de ne pas être acquittée,pour un crime de sang
Alors plutôt que de prendre vingt ans d’emprisonnement.
volontairement, il a mit fin à ses tourments.
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A 19 printemps, squatter chez mes parents
faire le fils à ma maman me semblait indigne de mon talent
De moi, je voulais me sentir fier
mais ne savais ni quoi, ni comment faire,
j’avais bien sûr bon pied, bon œil
et aussi surtout beaucoup trop d’orgueil
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Moi, je n’étais pas très chaud pour l’auto-destruction
J’avais mes principes: » Hola ! Attention! »
Mais en bon adepte de l’auto-punition
je recherchais l’aventure, le risque, le frisson.
J’ai eu deux associés , deux gars avec qui bourlinguer
Se la raconter, galérer, se la péter, galérer et intriguer:
Un, au visage d’ange,au vice et à l’intelligence étranges
Qui à douze ans avait revendu un faux ticket de PMU gagnant
A un voyou confirmé de trente ans et qui passait son temps
En estanquant gentils, méchants ,ennemis et soi-disants amis.
On s’est séparés quand l’héroïne a joué le premier rôle dans sa vie.
L’autre moitié Feuj moitié Beur mais qui n’avait pas tout son cœur,
Qui avait entendu dire que j’étais braqueur et croyait faire son beurre
M’a finalement dit: »Toi, à quarante ans tu seras clochard ! »
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Un moment j’y ai cru à son histoire.
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A 19 printemps, squatter chez mes parents
faire le fils à ma maman me semblait indigne de mon talent
De moi , je voulais me sentir fier
mais ne savais ni quoi, ni comment faire
j’avais bien sûr bon pied, bon œil
et aussi surtout beaucoup trop d’orgueil
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Depuis, un siècle ,un millénaire ont passés.
Calendriers, calendes oubliées
Moi, j’ai fais l’effort de me redresser
et après quelques répétitions
j’ai finalement retenu la leçon
et j’ai retrouvé au fond de moi ,une petite voix
qui me dit
“Aimé , écoutes-moi, quand tu marches droit , je suis fier de toi! »
« Aimé,écoutes-les , quand tu marches droit, ils sont fiers de toi !”
“Aimé, écoutes-toi, quand tu marches droit , tu es fier de toi !”
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Aimé NOUMA, Le Raincy